Avec « Voiles et Dévoilements », la camerounaise Angèle Etoundi Essamba nous fait découvrir un autre univers féminin. Ces femmes de Zanzibar se retrouvent face à l’océan Indien et un autre regard.
Elles lui diraient dans l’île « qu’elles n’exhibent pas leurs parures » (Coran, 24 : 31)
Derrière l’étoffe, la peau d’ébène, derrière la peau, l’être
Le souffle du créateur se glisse entre les voiles
Les regards disent l’indicible beauté du monde
Les femmes masquées d’un bonheur irréversible
Au bord des lèvres
Dans la supplication des corps inassouvis
Et dansent les yeux aux pupilles profondes
Sur les murs l’écriture du temps, du temps qui passe
La photographie comme plaisir du regard restituant les instants partagés dans une sublimation à peine voilée… Telle serait une des hypothèses qui motivent la démarche d’Angèle Etoundi Essamba. Comme elle, ne sommes-nous pas en quête d’une vérité poudrée d’éblouissements rimbaldiens ?
Zanzibar est le théâtre de ses prises de vues. Elle s’imprègne des matières, des couleurs, des corps vivants qui jouent des « voiles et dévoilements ».
Les sujets sont d’une beauté troublante.
D’où surgissent ces femmes ? De la douceur de l’Océan Indien ?
Prêtresses de la beauté, leurs pieds-noirs foulent le sable blanc et leurs empreintes parfumées s’effacent à la première vague…
La couleur serait l’enjeu de ce théâtre des sirènes de Zanzibar où tout n’est que transparence, mouvement invitant à fleurir les imaginaires.
La camera obscura plantée sur l’île, Angèle Etoundi Essamba déploie son talent de mise en scène et capte la magie des gestes, des regards, des poses lascives. Les étoffes tissées d’air et de fils de soie habillent les féminités insolentes. Les images parlent une langue inconnue et l’on songe à une terra incognita loin, très loin de nous.
Pierre Jaccaud