La Fondation Blachère présente, du 7 octobre 2014 au 7 mars 2015 dans son centre d’art à Apt (Vaucluse, France), La Parole aux Femmes. Cette exposition rassemble Ifeoma Anyaeji (Nigéria), Safaa Erruas (Maroc), Cecilia Ferreira (Afrique du Sud), Justine Gaga (Cameroun), Ayana V. Jackson (Etats-Unis/Afrique du Sud), Hélène Jayet (France), Euridice Kala (Mozambique/Afrique du Sud), Wanja Kimani (Kenya/Ethiopie), Mavis Tauzeni (Zimbabwe), Ope Lori (Grande-Bretagne) et Kara E. Walker (Etats-Unis).
Nouvelle version de l’exposition inaugurée au Manège par l’Institut Français à Dakar en 2011, cette exposition tient son titre de l’ouvrage La Parole aux Négresses (1978) d’Awa Thiam, un des premiers écrits féministes africains, et étend sa réflexion vers une approche contemporaine transcontinentale et diasporique. Cette nouvelle présentation comprend une série d’œuvres inédites commandées par la Fondation à des artistes sélectionnées par Christine Eyene, et réalisées lors de l’atelier artistique qui s’est tenu en janvier 2014 à Wemah Art Project, Bonendalè (Cameroun) ainsi qu’en résidence à Apt. À celles-ci s’ajoutent des œuvres de plasticiennes ayant développé un questionnement de longue date sur l’expérience du corps en général, féminin et noir, en passant de l’intime aux récits collectifs.
L’exposition s’ouvre sur la résidence comme point de rencontre entre soi et l’autre, en terre étrangère, dans un contexte inconnu. Négocier cet environnement par le biais de la perception et l’intuition est l’approche adoptée par Wanja Kimani dans son poème-vidéo Fleuve Wouri et Mavis Tauzeni dans ses impressions peintes combinant autoportraits et paysages. Open Door Policy, paroi en sacs plastique tressés d’Ifeoma Anyaeji, marque la vague frontière existant entre l’espace public et l’espace privé au sein du village de Bonendalè, invitant aux indiscrétions des passants. C’est dans la chambre d’Euridice Kala, reproduite à la Fondation Blachère, que se satisfait cette curiosité ; à travers des notes personnelles inscrites sur les murs et un journal intime vidéo.
Continuant sur la voie de l’intime, les vidéo-performances de Cecilia Ferreira et Ope Lori invitent à une exploration du corps, des canons esthétiques, de la sexualité et ses diverses orientations. Tout comme chez Lori, l’accent mis sur le corps noir se reflète dans Colored Only (2010 – en cours), série photographique d’Hélène Jayet glorifiant le cheveu crépu à travers des portraits stigmatisant les coiffures « afro » comme style individuel, signe identitaire, et remettant en question la racialisation qui influence les concepts de beauté dans l’imagerie dominante.
Leapfrog (a bit of the other) Grand Matron Army (2010) d’Ayana V. Jackson est une série d’autoportraits photographiques retraçant de multiples générations de femmes noires-américaines de l’époque précoloniale à nos jours. Se situant à la croisée des notions de race et de classe, cette série évoque la relation entre le désir, l’objéification, les privilèges et la mobilité des classes sociales.
Le récit transatlantique se poursuit avec Testimony : Narrative of a Negress Burdened by Good Intentions (2004) de Kara E. Walker. Dans cette vidéo s’opère une inversion des rapports de pouvoir entre genres et races, à l’issue duquel l’ancien maître blanc se fait lyncher par les maîtresses noires.
Au dénouement « castrateur » du film de Walker fait écho l’installation de Justine Gaga composée de figurines de bois asexuées présentées dans des grilles, étrangement similaires à des phallus en cage.
Enfin Corazones Desnudos de Safaa Erruas, créé en résidence à la Fondation Blachère, réduit le corps à son premier organe vital. Erruas dénude le cœur dans un processus alliant photographie et techniques mixtes incluant l’emploi d’aiguilles, fibre de verre, morceaux d’ampoules cassées et fils métalliques. De cette intervention plastique, ni le corps ni le cœur n’en sortent indemnes.
Cette exposition s’accompagne d’un catalogue.
La Parole aux Femmes
7 octobre 2014 > 7 mars 2015
Christine Eyene / commissaire d’exposition
Scénographe / François Viol