Cet été, la Fondation Blachère présente, dans son centre d’art à Apt dans le Vaucluse, une exposition monographique ainsi qu’une nouvelle installation lumineuse réalisée en collaboration avec l’artiste anglo-nigérian Yinka Shonibare MBE.
L’exposition est organisée autour de la puissante installation Egg Fight, qui vient juste d’entrer dans la Collection Blachère. Cette représentation du conflit, basée sur l’ouvrage Les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift où l’on narre une lutte de longue date, est une allégorie à peine voilée des différences religieuses entre les Protestants et les Catholiques, qui illustre parfaitement la fascination de Shonibare pour le choc entre culture, politique et société.
Pendant que les deux figures engagées dans la « bataille des œufs » (Egg Fight) se préparent au combat au travers d’une division physique, les protagonistes de la vidéo et des photographies Odile & Odette, réalisées en collaboration avec le Royal Opera House de Londres, se reflètent l’une et l’autre de chaque côté d’un cadre Baroque ornementé. Ici, l’artiste crée une complexe et subtile interaction entre deux danseuses, pour lesquelles la dualité des personnages est mise en avant par la différence de couleur.
Est aussi inclus l’emblématique et sculpturale installation The Crowning, inspirée des œuvres de Jean-Honoré Fragonnard, exposée en 2007 au Musée du Quai Branly à Paris. Cette œuvre, comme l’installation murale Little Rich Girls, établit un lien entre les loisirs, l’opulence, les plaisirs et l’exploitation du travail des esclaves, posant des questions sur la colonisation et ses conséquences. L’excès rococo et la romance parfumée de The Crowning intensifie la collision entre pouvoir et moralité, une bataille qui peut mener à la révolution, également illustrée par Revolution Kid (Calf), et à la mort, une fatalité représentée dans la série photographique des Fake Death. La représentation du choc par Shonibare, à la fois littéral et symbolique, continue avec Climate Shit Drawing, une série d’œuvres qui se lancent dans le conflit des changements climatiques, un champ de bataille mondial à la fois nouveau et primordial.
Egg Fight et les œuvres majeures qui l’accompagnent, prêtées par plusieurs institutions, galeries et collections privées, relatent l’obsession de Shonibare pour les batailles entre des forces opposées, à la fois réelles et métaphoriques, que ce soit entre ou sur la religion, l’opulence, le pouvoir, la moralité, le plaisir, la colonisation, l’environnement ou encore sur les arts.
Ces clashes sont parfaitement résumés par le tissu emblématique de son travail, communément utilisé pour les robes africaines. C’est en fait un textile produit en masse, manufacturé en Hollande, d’après des motifs de wax originaires d’Indonésie. Prévu pour une exportation massive, ce tissu a été rejeté par les indonésiens et est devenu populaire dans l’ouest de l’Afrique, au moment où les nations émergentes se sont créé une identité lors de l’abolition du joug colonial. Les routes commerciales, qui produisent et consomment ce tissu, sont utilisées par Shonibare pour analyser la production complexe de l’identité et du pouvoir dans la période post-coloniale. Ces motifs seront reproduits dans la nouvelle installation extérieure de l’artiste, une robe Victorienne lumineuse de 4 mètres de haut, réalisée en collaboration avec Blachère Illumination, qui sera exposée dans le jardin de la Fondation.